Minh Tran Huy est une romancière française d’origine vietnamienne. Elle a été rédactrice en chef adjointe du Magazine littéraire, mensuel consacré à la littérature et la philosophie. Son premier roman, « La princesse et le pêcheur », a été finaliste du Goncourt du premier roman et du prix des Cinq continents. Les œuvres suivantes lui ont valu d’être plusieurs fois sélectionnée et d’obtenir des prix prestigieux.
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Prix Michel Tournier 2023 Sélection Adulte
« Un enfant sans histoire » de Minh Tran Huy – Actes Sud – 2022
En exergue de son livre, Minh Tran Huy cite Georges Perec : « Quelque part je suis étranger à quelque chose de moi-même ; quelque part, je suis « différent », mais pas différent des autres, différent des miens ». Cette phrase pourrait servir d’introduction à l’autisme considéré comme un écart.
L’autisme est effectivement un monde à part. Longtemps la France n’a admis que le traitement psychiatrique des autistes, alors qu’aux Etats-Unis et en Belgique, par exemple, les autistes étaient reconnus comme des personne à éduquer, car capables d’apprentissage. Ces pays recommandent et utilisent le traitement, dit ABA, Applied Behavior Analysis, reposant sur les sciences du comportement et s’appuyant sur la motivation de l’enfant, qui a donné de très bons résultats pour de nombreux autistes.
Minh Tran Huy nous apprend deux choses :
- Le spectre de l’autisme est extrêmement large si bien que, la méthode ABA peut réussir pour certains autistes et donner des résultats spectaculaires quand, pour d’autres, elle est quasiment sans effet significatif ; cela est le cas de petit Paul, le fils de l’auteure.
- Avoir un enfant autiste est vécu comme un coup de massue qui désoriente complètement les parents ; ceux-ci cherchent alors des aides mais doivent tâtonner dans un labyrinthe administratif et médical infernal qui consomme une énergie phénoménale alors que simultanément l’enfant autiste réclame une attention de tous les instants.
Elle évoque cette souffrance et cette fatigue qu’elle résume par une phrase de Natasha Trethewey, également mise en exergue : « Pour survivre au traumatisme, il faut pouvoir le raconter sous forme d’histoire ». C’est précisément ce qu’elle fait en alternant en « écho-dissonant » les chapitres consacrés à son fils, petit Paul, avec les chapitres narrant le parcours hors norme de Temple Grandin, née en 1947 à Boston, qui devint internationalement célèbre par ses facultés et dons exceptionnels pour comprendre le monde animal.
La puissance de ce livre tient au fait qu’il nous touche, à mesure que l’on prend conscience du parcours courageux d’une mère, et qu’il informe sur l’autisme sans hésiter à fournir des statistiques et des adresses (sigles) utiles aux parents concernés. Il est donc la preuve que la grande littérature et esprit pratique ne sont pas antinomiques.